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Giuseppe l'ortolano

Giuseppe - Villégiature et Convivance.jpg

GIUSEPPE

 
La profession de mon grand-père n’existe plus aujourd’hui: il était ortolano ( maraicher ambulant ). Il avait une jument , Germina. Avec elle il arpentait tout un flanc de montagne, et approvisionnait tous les villages suspendus en légumes et fruits parce que ces villages manquaient d’eau, et rien ne poussait en haut des montagnes l’été.

Il préparait son chargement trois fois par semaine et la veille de son départ, il chargeait ses légumes:  poivrons, aubergines, tomates, choux, carottes, brocoletti, paquets par paquets.
Tel un peintre il disposait ses fruits et légumes comme une œuvre d’art, sa disposition me rappelait un peintre du moyen âge. Il vendait aussi des petits bouquets de fleurs zinnia, œillets, dahlias, etc..
Giuseppe avait fabriqué avec la stramma un attelage approprié, et à califourchon, avalait les kilomètres pour pouvoir vendre sa marchandise et vivre de son labeur.

Mon grand-père était très fragile, car pendant son jeune âge, il avait participé à la bataille de Dardanelli et était rentré malade de cette bataille, traînant toute sa vie une fragilité pulmonaire.
Mon grand-père avait le certificat d’études, il savait lire et écrire et si il en avait eu les moyens il aurait pu continuer plus avant. Il était passionné de politique et aimait nous réciter l’histoire d’Italie, notamment de Garibaldi, et de l’unification des états italien.

Fils de paysan, on lui a interdit de continuer l’école. Il fallait travailler et gagner son pain.
Aux vues de ses connaissances et de son intelligence, il savait exploiter la terre avec respect,  respectait la biodiversité et l’osmose entre les plantes et le monde animal, il n'utilisait aucun produit chimique et les semences d’années en années se transmettaient. Tout venait de la ferme, aucun produit industriel n'y avait sa place.

On semait le blé en février, et au mois de juin, une fois la batteuse passée, nous apportions le blé au moulin et nous avions de la farine pour toute l’année. La vigne, produisait un raisin qui datait de l’époque romaine, un raisin à la saveur de fraises. Aux mois de septembre et octobre après les vendanges, un vin délicieux venait remplir les tonneaux en fûts de chêne qui dataient déjà de plusieurs générations.

L’été, les tomates rouges écarlate, gorgées de soleil, devenaient coulis. C'était une ancienne variété de tomates que nous conservions depuis plusieurs générations. Nous avions dans une cave une grande pièce fraîche, blanchie à la chaux. Cette pièce était fermée à clé car aucun gaspillage n'était toléré, et on y stockait toutes les victuailles: olives, huile d’olive, fromages, saucisses, etc.. Enfants, nous aimions cette pièce, si bien que nous l'avions nommée: "la caverne d’Ali Baba".

La basse cour avec les poules, le coq qui nous réveillait les matins de bonne heure. Nous avions très peu accès à la viande, car une partie de notre production devait être vendue pour payer les taxes à l'état, et en compensation nous consommions les légumes secs et des céréales.

Aucune aide ne nous venait de l’extérieur: je n’ai jamais entendu parler d’"allocations familiales" ou d’"allocations chômage": dans le monde paysan il existe une fierté peut-être parfois mal placée, et on ne demande pas d’aides, surtout pas à l’état. On a trop peur de perdre sa liberté.

J’ai toujours admiré ce savoir-faire paysan et l’autosuffisance avec lesquels nous étions capables de vivre, à l'aide de techniques rudimentaires. Nous étions "les petits paysans" comme disait ma grande mère, avec peu de terre, les artisans, les maçons, fonctionnaient avec cette économie de subsistance. Le labeur à bout de bras.

Mes sœurs, mon frère et moi, participions au travail de la terre en même temps que nous allions à l’école. C'était une exploitation familiale, chacun apportait son aide.

En ce qui me concerne, et pour ne pas rompre avec mes racines de ce monde-là, je garde une grande fierté, de cette force qu'il faut pour le travail aux champs, la passion de la terre, la simplicité du bon sens paysan, et la témérité de l'animal sauvage: toutes ces valeurs me suivront dans l'éternité.

 
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Date de création : 18/03/2016 @ 14:59
Dernière modification : 26/04/2020 @ 18:08
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